Mouvement vs progrès: Créer un environnement d’apprentissage moteur

Créer un environnement d’apprentissage moteur est important pour apporter des changements durables et axés sur l’apprentissage dans la façon dont nos athlètes bougent.

Faire des maths ou jouer au basket, c’est essayer de résoudre un problème

Les meilleurs des meilleurs, les génies, sont incroyablement doués pour résoudre certains types de problèmes spécifiques.

Y arriver est multifactoriel et je ne suis pas sûr que nous puissions mettre le doigt exactement sur la façon de former quelqu’un à devenir un génie dans quelque chose. Cependant, je suis presque certain qu’un génie n’est pas simplement arrivé là par magie. C’était probablement le résultat du talent et de beaucoup de pratique délibérée.

Des expressions telles que « nous sommes ce que nous faisons de manière répétée » et « la pratique rend permanent » sont des moyens simples d’exprimer comment nous acquérons de nouvelles habiletés motrices par la pratique et l’assimilation de tâches qui deviennent ensuite raffinées et automatiques.

Cela implique que la performance nécessite de créer un environnement d’apprentissage moteur pour renforcer les connexions qui incluent tous les éléments de la tâche : l’influx sensoriel, schémas de mouvement et informations cognitives.

Dans cet article, nous explorerons les nombreux éléments différents qui entrent dans la création de cet environnement pour nos athlètes.

Mouvement vs Progrès : Gaspillez-vous simplement votre argent

La pratique délibérée dans l’entraînement ou la réadaptation signifie avoir un plan structuré dans le but de créer un environnement d’apprentissage pour l’athlète. C’est une optimisation du temps et des ressources disponibles.

C’est pourquoi j’aime l’idée du mouvement vs le progrès. Vous pouvez travailler extrêmement dur, mais si vous tournez en rond, vous ne gagnez pas de terrain. Je préfère de loin marcher en ligne droite vers une destination donnée.

Essentiellement, si le plan d’entraînement ou de réadaptation n’est pas structuré de manière à créer un environnement d’apprentissage, eh bien… vous pourriez aussi bien brûler votre argent. Vous dépensez de l’argent en entraînement et en réadaptation sans grand retour sur investissement. Une toute nouvelle voiture est plutôt chouette, elle vous procure du bonheur, mais elle ne fera pas fructifier votre argent. D’un autre côté, mettre le même montant d’argent sur une mise de fonds pour une propriété pourrait être une meilleure idée.

Maintenant, ne montez pas sur vos grands chevaux ici, il y a toujours des exceptions à la règle. Je sais que l’adhésion à un programme est basée sur la motivation et donc sur l’appréciation du programme. Mais j’espère que vous avez compris. Les ressources disponibles sont limitées et nous devons les utiliser à bon escient.

Chaque fois que nous nous déplaçons, nous dépensons de l’énergie. Que ce soit via la concentration, la vitesse, la force, l’endurance… on dépense. Les dépenses sont ok. C’est pourquoi nous avons de la monnaie (dans ce cas, l’énergie). Cependant, il y a une différence entre la valeur et le prix. Un exercice peut avoir le même prix qu’un autre mais peut ne pas avoir la même valeur. La valeur est ce que vous obtenez de votre investissement. Et cela dépendra du contexte, qui sera dicté par vous et votre objectif.

La création d’un environnement d’apprentissage est ce qui nous donne le meilleur retour sur investissement car cela ajoute de la valeur à ce sur quoi nous dépensons de l’énergie

Le monde des contraintes

Il existe 3 types de contraintes sous l’égide de l’apprentissage moteur écologique : individuelle, environnementale et liée à la tâche.

Individuelle : Si vous n’avez qu’un marteau, tout ressemble à un clou

Les contraintes individuelles peuvent être influencées par des compétences perceptives, cognitives, physiques ou motrices. Si nous nous concentrons ici sur l’aspect physique, lorsque vous manquez de compétence de mouvement, vous réduisez votre variabilité de mouvement. Autrement dit, vous avez moins d’options de mouvement.

Avoir moins d’options de mouvement conduit à une surutilisation du chemin de moindre résistance, créant un mouvement excessif, imprécis ou insuffisant. Nous pouvons définir cela comme un patron compensatoire, un mauvais choix de mouvement ou un patron moteur sous-optimal.

Essentiellement,

les ressources que possède un individu vont dicter la façon dont le problème moteur peut être résolu

Vous pouvez trouver la longueur de l’hypoténuse d’un triangle sans le théorème de Pythagore, mais ce n’est probablement pas le moyen le plus efficace de résoudre le problème. L’importance de la maîtrise technique est que c’est le moyen idéal ou le plus efficace d’utiliser un système organisé de mouvements pour résoudre une tâche motrice donnée.

Tâche : Les règles du jeu

Ce qui se rapporte à la tâche à accomplir, c’est comme connaître les règles du jeu de football. Dans le jeu, différentes tâches peuvent être nécessaires du quart-arrière, comme lancer une passe d’écran ou un hail Mary. Les deux tâches vont nécessiter une solution différente.

Environnement : Le chaos qui teste l’adhérence d’un patron

“Pratiquement tous les mouvements visent à réaliser quelque chose dans l’environnement. Dans tous les cas, chaque mouvement se déroule dans un environnement. Mécaniquement, l’environnement influence les mouvements à travers les forces de l’environnement qui agissent sur le corps.” (Bernstein, 1996)

L’adhérence d’un mouvement donné va être observée dans la façon dont il surmonte ou réagit aux forces externes qui proviennent de l’environnement. Dans le sport, cela signifie les mouvements de l’adversaire, la surface de jeu, les fans ou la météo.

Dans le monde de l’entraînement, cela peut être un peu différent, car se mettre sous la barre n’apporte pas beaucoup de surprises. Cependant, il y a une grande différence entre un épaulé-jeté avec un manche de balai et avec 200 lbs.

Avec 200 livres au-dessus de votre tête, je suis presque sûr que votre corps ne se souciera pas de la façon dont vous soulevez le poids. Votre corps ne fera pas ce qui est “bon”, il fera ce qui lui est familier. Donc, ce qui est familier vaut mieux être techniquement solide ou vous pourriez vous retrouver dans des positions sous-optimales.

En résumé, les choix de mouvement sont faits en fonction des ressources disponibles d’un individu pour satisfaire les exigences de la tâche en tenant compte des facteurs environnementaux. C’est l’interaction entre l’individu, la tâche et l’environnement qui va influencer le mouvement.

Tous ces éléments doivent être pris en compte pour intervenir sur l’optimisation du mouvement, l’acquisition et la maîtrise de compétences. Fournir des instructions, des objectifs ou des indications sur l’habileté ou le résultat sans un processus clairement défini de développement de progressions adaptées aux besoins de l’individu n’est pas idéal pour développer la compétence, la maîtrise et, essentiellement, la performance sportive.

Créer un environnement d’apprentissage moteur

Lors de la conception d’un programme d’entraînement ou de réadaptation avec l’objectif d’apprentissage moteur, il est important de comprendre les étapes de l’apprentissage. Si nous ne le faisons pas, nous aurons du mal à créer des changements durables dans le mouvement et le comportement. Après avoir lu cet article, vous devriez voir comment la stratégie Mobilisation-Activation-Intégration a beaucoup de sens pour créer un environnement d’apprentissage moteur.

De nombreux mouvements reposent sur l’automaticité. Dans nos activités de la vie quotidienne, nous ne pensons pas à stabiliser l’omoplate pour récupérer le lait au réfrigérateur. Cela arrive tout simplement. Mais si ce patron devient dysfonctionnel, disons à la suite d’une blessure, nous devrons créer un nouveau patron moteur. Pour ce faire, nous avons besoin d’un environnement d’apprentissage moteur.

Dans un plan de réadaptation, cela signifie que l’individu doit comprendre ce qu’il fait, être conscient et ressentir le nouveau mouvement. Ce n’est qu’alors qu’un nouveau patron moteur peut émerger. Si la compréhension, le ressenti et la conscience ne changent pas, l’ancien patron continuera toujours à prendre le relais pour accomplir la tâche.

Par exemple, si la stabilité scapulaire d’un individu est perturbée à la suite d’une blessure, nous devrons créer un environnement et une structure qui nécessitent initialement beaucoup d’information, d’effort et d’attention consciente. La pratique délibérée crée alors un modèle qui devient plus inconscient, automatique et fluide.

Mobilisation

L’objectif de la séquence de mobilisation est de « créer de l’espace » ou un meilleur espace pour bouger. L’objectif principal de cette séquence est de rendre l’individu plus apte à se déplacer en lui fournissant les ressources nécessaires.

Prenons notre exemple de stabilité scapulaire. Lorsque la scapula ou l’articulation scapulothoracique devient instable, l’élévateur de la scapula devient souvent hyperactif pour élever la ceinture scapulaire afin de mieux positionner la glène et/ou de fournir une amplitude de mouvement en flexion et en abduction.

Si nous espérons créer un nouveau modèle de mouvement de l’omoplate, nous devons nous assurer que nous pouvons « désactiver » autant que possible le mauvais modèle. Un relâchement de l’élévateur avec une balle de crosse peut être un moyen simple et efficace de réguler à la baisse le muscle et de créer un meilleur espace dans lequel nous aurons le mouvement individuel:

La séquence de Mobilisation peut aller bien au-delà du simple relâchement des tissus mous : des stratégies musculaires, articulaires ainsi que neurales peuvent être incluses pour fournir au système nerveux autant de ressources que possible pour une meilleure capacité de mouvement. Si vous souhaitez en savoir plus à ce sujet, dirigez-vous vers notre formation en ligne sur les Fondamentaux de la Mobilité.

Activation

L’objectif de la séquence d’activation est de « créer une prise de conscience ». L’objectif est de provoquer des changements et de renforcer les connexions pour former les éléments d’un comportement (ou mouvement) particulier.

Les contractions isométriques sont un outil très utile dans la séquence d’Activation. Plus de temps est passé dans une position donnée pour créer la sensation. Tout est une question de sensation. Vous ne pouvez pas activer ce que vous ne pouvez pas ressentir.

Pour notre exemple de stabilité scapulaire, l’Activation consiste à apporter une grande conscience du positionnement de la scapula : à mesure que l’extrémité supérieure s’élève, la scapula glisse autour de la cage thoracique en protraction et en bascule postérieure :

Intégration

L’objectif de la séquence d’Intégration est de « créer un comportement ». L’objectif est de maintenir le positionnement et d’améliorer le séquençage pendant un patron de mouvement spécifique sous contrainte ou un comportement.

Ici, l’individu met en place des actions et pratique, pratique, pratique.

Par exemple, avoir besoin de maintenir la scapula dans une position de stabilité à l’aide d’une prise kettlebell bottoms-up :

Bien qu’il y ait encore un effort conscient ici, l’objectif est de progresser vers des mouvements plus dynamiques et des positions plus difficiles à mesure que la performance devient de plus en plus inconsciente et fluide.

Au fur et à mesure que la nouvelle sensation est obtenue, nous pouvons progresser à travers les étapes motrices pour défier l’habileté, l’objectif final étant d’avoir un patron de mouvement adaptable à la tâche et résistant aux changements de l’environnement. Il doit être si fort que rien ne peut l’affecter.

Jouer aux échecs ou jouer au basket : les deux demandent de résoudre des problèmes

Il y a beaucoup à apprendre des maîtres d’échecs. La première étape vers la maîtrise est de comprendre les règles du jeu. Ici, savoir comment chaque pièce du plateau peut se déplacer afin d’atteindre l’objectif final : échec et mat. C’est la nature de la tâche à accomplir.

Ensuite, il est important d’avoir la capacité d’analyser et de prendre des décisions éclairées concernant le jeu. Cela dépendra des ressources de l’individu.

Et puis, il y a l’environnement ; l’interaction entre les deux joueurs et l’impact de chaque stratégie utilisée sur le placement des pièces sur le plateau. C’est là que se trouve l’argent. Un maître d’échecs est incroyablement doué pour lire et s’adapter au jeu.

Cependant, les maîtres d’échecs s’entraînent non seulement en jouant au jeu, mais en déconstruisant l’échiquier et en jouant à n’importe quelle situation de jeu donnée. Cela permet la reconnaissance des patrons de jeu. Déconstruire le jeu de cette manière est comparable à déconstruire le mouvement pour se concentrer sur les différentes contraintes d’apprentissage moteur.

Lebron James est autant un génie que Magnus Carlsen, le meilleur joueur d’échecs actuel. La seule différence est que Lebron n’est pas un génie des mathématiques, c’est un génie du mouvement.

Notre objectif final en tant qu’entraîneurs ou thérapeutes est d’aider nos clients à devenir des génies du mouvement. Nous le faisons en leur fournissant des ressources et en créant un environnement d’apprentissage moteur afin d’optimiser leur capacité à résoudre des problèmes.

References

Bernstein, N. A. (1996). Resources for ecological psychology. Dexterity and its development. (M. L. Latash & M. T. Turvey, Eds.). Lawrence Erlbaum Associates, Inc.

Marc-Antoine Bérubé

en collaboration avec Mai-Linh Dovan M.SC., CAT(C)

Marc-Antoine est impliqué dans le baseball depuis de nombreuses années. Il a joué au sein de la structure de Baseball Québec, au Northeastern Oklahoma A&M College et à l’Université de Pittsburgh. En 2015, il a été sélectionné dans le repêchage de la MLB par les Oakland Athletics. Depuis sa retraite, Marc-Antoine transmet sa passion aux jeunes espoirs en tant qu’entraîneur des lanceurs de l’Académie Baseball Canada.