Les exercices de la coiffe des rotateurs surutilisés et mal utilisés

Les exercices de la coiffe des rotateurs sont nuls ! … Ou le sont-ils ?

J’imagine que je voulais juste attirer votre attention. En fait, je ne pense pas vraiment que les exercices de la coiffe des rotateurs soient nuls, je pense juste qu’ils sont surutilisés et souvent mal utilisés comme moyen à toutes fins pour tout ce qui est lié à la douleur de l’épaule. Ce qui, à bien y penser, signifie qu’ils ont le potentiel d’être nuls.

Mais ce ne sont pas les exercices qui sont nuls, c’est l’application

J’ai eu une étudiante en stage qui travaillait avec moi ce semestre. Elle me connaît depuis longtemps et a entendu (ou vu) bon nombre de mes critiques sur les exercices de rotation externe. Ainsi, elle a été surprise quand elle m’a vu travailler avec des clients et utiliser divers exercices de rotation externe.

Ma réponse était que ce n’est pas que ces exercices sont mauvais, ni inutiles. Cependant, ils peuvent l’être s’ils ne sont pas exécutés correctement, s’ils ne sont pas prescrits de manière appropriée et/ou s’ils ne sont pas placés dans une stratégie visant à optimiser leur efficacité.

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Le plus grand écart que je vois entre la clinique et la salle de sport est le manque de réels programmes de réadaptation. Les gens se font soigner et limitent (peut-être) certaines de leurs activités à la salle. Dans le meilleur des cas, on leur propose un ou deux exercices de réadaptation génériques à intégrer à leur routine quotidienne, comme un exercice de rotation externe… ou peut-être trois. En fin de compte, ils se sentent mieux après le traitement, mais ils ne s’améliorent pas, ou du moins pas aussi rapidement qu’ils le devraient.

EXERCICES DE ROTATION EXTERNE

Est-ce mal de donner à quelqu’un avec un problème de coiffe des rotateurs un exercice de rotation externe ? Ce n’est généralement pas le cas, mais cela peut l’être. Je sais que ce n’est pas une réponse, mais je peindrai un tableau plus clair au fur et à mesure que nous avancerons dans cet article.

Du point de vue de la réadaptation, un exercice de rotation externe est généralement pratiqué pour réactiver un muscle, ce qui est important pour de nombreuses raisons. Les blessures articulaires peuvent provoquer une inhibition musculaire arthrogénique. Il s’agit d’une déficience clinique causée par une inhibition réflexe continue de la musculature entourant une articulation suite à des dommages aux structures de cette articulation.

De plus, l’immobilisation, la limitation, la restriction et/ou l’appréhension de certains mouvements ou amplitudes de mouvements peuvent entraîner une diminution de l’activation musculaire.  La douleur et/ou une blessure musculaire engendrent eux aussi de l’inhibition musculaire.

En entraînement, nous prescrivons des exercices d’activation périphérique pour améliorer la connexion esprit-muscle : pour améliorer la capacité de recruter et de contracter un muscle. Nous pouvons visualiser nos exercices de rotation externe de la même manière. L’objectif est de stimuler l’activation neuromusculaire.

LÀ OÙ LES CHOSES TOURNENT MAL

1. Exécution appropriée

Il n’y a probablement rien de plus répandu dans notre industrie que des exercices simples mal exécutés. Les exercices de la coiffe des rotateurs en font partie. Il y a une place pour des exercices simples et de base, et ils peuvent être très efficaces s’ils sont exécutés correctement, et peut-être plus important encore, avec la bonne intention.

L’exécution peut se gâter pour de nombreuses raisons différentes. D’une part, j’observe que les exercices d’activation se gâtent lorsque les gens commencent à les considérer comme des exercices de renforcement. Plus vous chargez un exercice, plus vous créez d’opportunités de compensation. Et c’est probablement encore plus vrai pour les exercices qui nécessitent une exécution méticuleuse. Je persiste à expliquer à mes clients qu’un exercice d’activation devrait presque être plus cognitif que physique.

Une autre chose que je suis certaine que vous remarqué, c’est que les gens laissent l’épaule rouler vers l’avant à chaque répétition. Un muscle se raccourcit-il ou s’allonge-t-il si vous déplacez les deux points d’insertion ? Pouvoir effectuer correctement un exercice de rotation externe nécessite de pouvoir contrôler la scapula. C’est donc toujours une bonne idée d’inclure des exercices de conscience et de contrôle des mouvements scapulaires dans le mélange.

Regardez la vidéo principale pour en savoir plus sur la bonne exécution des exercices de la coiffe des rotateurs.

2. Prescription appropriée

Si vous avez entendu mes critiques sur les exercices de rotation externe, vous m’avez entendu dire que vous pouvez en fait irriter encore plus la coiffe des rotateurs en les utilisant. Une partie de cela peut se résumer à une exécution appropriée, tel que discuté, mais parlons aussi de la prescription.

Les exercices de rotation externe peuvent être effectuées de plusieurs manières. A zéro degré d’abduction, à 90 degrés d’abduction, couché sur le côté, ou…avec le coude appuyé sur le putain de genou (mon préféré, comme vous pouvez le voir).

Comment choisissez-vous? Une meilleure question : comment devriez-vous choisir ? Souvent, nous nous appuyons sur la recherche et nous choisissons des exercices qui se sont avérés avoir la plus grande activation par EMG. Par exemple, les gens utilisent souvent un exercice de rotation externe à 0 degré d’abduction (avec le coude appuyé sur le côté), qui s’est avéré avoir une activité EMG élevée.   La position permet également à la scapule de reposer sur le thorax et détend la musculature scapulaire . On dirait que c’est un exercice incontournable, n’est-ce pas ? Vous l’avez deviné, pas exactement.

Des études récentes ont démontré que la compression peut jouer un rôle dans la tendinopathie. Cook et Purdam ont publié un article très intéressant à ce sujet en 2011 : Is compressive load a factor in the development of tendinopathy? Plus précisément, la combinaison de charges de compression et de traction sur le tendon peut être particulièrement dommageable. À zéro degré d’abduction, lorsque votre bras est à vos côtés, le tendon du supra épineux, est essentiellement appuyé contre la tête de l’humérus. L’exercice dans cette position soumet le tendon à une charge de compression plus élevée et peut être très irritable.

Contrairement à ce que l’on pourrait penser, il est parfois plus sûr de commencer la rotation externe à 90 degrés d’abduction ou parfois plus haut. Il suffit seulement d’être intelligents sur les positions que nous utilisons, en utilisant par exemple une position d’abduction en décubitus latéral.

Un autre muscle que nous devons garder à l’esprit est le sous-scapulaire. Contrairement aux 3 autres muscles de la coiffe, le sous-scapulaire est un rotateur interne, il est donc souvent oublié dans la prescription d’exercices de rotation externe traditionnelle. Cependant, il joue un rôle important dans la prévention de la migration supérieure et du déplacement antérieur de la tête humérale.

3. Stratégie optimale

Bien que les exercices de la coiffe des rotateurs fonctionnent bien pour stimuler l’activation neuromusculaire, ils n’induisent pas des niveaux d’activation suffisants pour stimuler la croissance et la force musculaire. Et sans force, il n’y a pas de résilience. C’est pourquoi nous devons toujours nous assurer de la force dans le continuum de soins et pourquoi j’utilise toujours l’expression « Rehab is training».

Le simple fait d’inclure des exercices de la coiffe des rotateurs dans le mélange et de ne rien faire d’autre que d’éviter certains mouvements ou de continuer à effectuer des mouvements avec moins de charge n’est pas une stratégie efficace. Les tissus sains finiront par être sous-chargés, une compensation pourra se produire, une appréhension du mouvement s’installera… et la liste est longue.

Les exercices de la coiffe des rotateurs doivent être intégrés dans une structure qui tourne autour de la gestion de la charge. Les exercices de réadaptation visent spécifiquement à restaurer une fonction normale après une blessure, mais des exercices de renforcement devraient également être inclus.

La gestion de la charge n’est rien de plus que la modification des exercices sélectionnés. Cela signifie que vous sélectionnez des variantes d’exercices, des méthodes et des schémas de chargement pour :

• Limiter les exercices qui déclenchent la douleur pour éviter l’irritation continue des structures sensibles ou sensibilisées
• Identifier les exercices qui ont le potentiel de charger les tissus non lésés sans surexposer les tissus lésés
• Surcharger progressivement le tissu lésé sans dépasser sa tolérance

STRATÉGIE POUR LA COIFFE DES ROTATEURS

Les exercices pour la coiffe des rotateurs PEUVENT être nuls ! Au lieu de cela, je vous exhorte à envisager une stratégie qui peut inclure ces exercices. En cas de blessure de la coiffe, les principaux muscles mobilisateurs comme les trapezes supérieurs, les deltoïdes, les pectoraux et les dorsaux sont souvent régulés à la hausse. Ce pourrait être une bonne idée de les réguler à la baisse dans la séquence de Mobilisation. L’objectif est de créer de l’espace et d’éviter que ces muscles “prennent le dessus” lorsque l’on travaille la musculature scapulaire.

Étant donné que les gens aiment généralement faire du relâchement avec une balle et trouvent que cela atténue leur tension, vous pouvez utiliser cette stratégie dans la séquence de Mobilisation. Voici un exemple pour les trapèzes supérieurs utilisant une balle de crosse :

Tel que mentionné précédemment, être capable d’effectuer correctement un exercice de rotation externe nécessite de pouvoir contrôler la scapula. Les exercices de prise de conscience et de contrôle scapulaires doivent précéder les exercices de la coiffe des rotateurs dans la séquence d’Activation. L’objectif est de prendre conscience et d’augmenter l’activation neuromusculaire.

Voici un exercice que j’aime utiliser pour promouvoir la conscience et le contrôle scapulaires :

Et voici 2 exemples d’exercices alternatifs pour la coiffe des rotateurs :

Vous pouvez ajouter de la difficulté à cet exercice en l’exécutant avec un kettlebell maintenu dans une position inversée.

Malgré le fait que cet exercice soit effectué à plus de 90 degrés d’abduction, il est généralement bien toléré par la plupart des gens. Comme avantage supplémentaire, vous pouvez l’utiliser pour sensibiliser au mouvement scapulaire (inclinaison postérieure) avec rotation externe.

L’intégration consiste essentiellement à maintenir la conscience et le positionnement sous charge, et bien sûr, la gestion de la charge tel qu’expliqué dans la section précédente. C’est essentiellement tout ce que vous changez dans votre programmation pour respecter le processus de réadaptation.

Sans compter que la coiffe des rotateurs est bien plus que des exercices d’isolation avec des bandes élastiques et des dumbbells. Les muscles de la coiffe fonctionnent de manière synchrone avec des schémas d’activation spécifiques qui ne peuvent pas être reproduits par la contraction volontaire des muscles seule à l’aide de ces exercices en isolation. Cette stabilisation dynamique et réactive est la véritable fonction de la coiffe, c’est-à-dire d’assurer une stabilité fonctionnelle. Si vous souhaitez en savoir plus sur la façon de restaurer la stabilité fonctionnelle, j’en discute longuement dans cet article.

Souviens-toi, la stratégie est d’autant plus importante que les exercices!

References:

Andersen, L., Magnusson, S., Nielsen, M., Haleem, J., Poulsen, K., & Aagaard, P. (2006). Neuromuscular Activation in Conventional Therapeutic Exercises and Heavy Resistance Exercises: Implications for Rehabilitation. Physical Therapy, 86(5), 683-697

Cook, J., & Purdam, C. (2011). Is compressive load a factor in the development of tendinopathy?. British Journal of Sports Medicine, 46(3), 163-168

Edwards, P., Ebert, J., Joss, B., Bhabra, G., Ackland, T., & Wang, A. (2016). Exercise Rehabilitation in the Non-operative Management of Rotator Cuff Tears: A Review of the Literature. The International Journal of Sports Physical Therapy, 11(2), 279-301

Farina, D., & Negro, F. (2012). Accessing the Neural Drive to Muscle and Translation to Neurorehabilitation Technologies. IEEE Reviews in Biomedical Engineering, 5, 3-14.

Mai-Linh Dovan M.SC., CAT(C)
Thérapeute du sport agréée
Fondatrice de Rehab-U