Oublie ton six-pack, sais-tu utiliser tes obliques?

Sais-tu utiliser tes obliques? Happy Gilmore avait raison, tout est dans les hanches.

Quelque chose qu’on entend souvent en développement athlétique, en particulier au baseball, c’est: «il faut avoir plus de séparation des hanches et des épaules pour lancer plus fort». Et c’est vrai pour à peu près tous les sports, comme le tennis, le lancer du javelot, la boxe, etc. Au golf, le concept est de notoriété publique et il y a beaucoup de recherches sur le sujet le liant à la production d’énergie et à la performance. Cette séparation entre la hanche et l’épaule est appelée le X-factor.

Cependant, bien que l’idée selon laquelle plus de séparation mène à plus de pouvoir semble souvent vraie, ce n’est pas le tout. On parle souvent d’étirer l’élastique – c’est à dire, obtenir plus de séparation – mais j’ai l’impression qu’on ne parle pas assez de le relâcher. En fait, tout ce qui compte, c’est de le relâcher. Il est pratiquement inutile de tirer sur l’élastique si on ne le relâche pas.

Tout comme la connaissance sans action,

l’énergie potentielle sans transfert en énergie cinétique n’est que du gaspillage

Voyons comment le fait de ne pas utiliser le X-factor de manière optimale peut restreindre la performance, étant donné que celle-ci ne consiste pas seulement à obtenir PLUS de séparation. Nous verrons également comment un mouvement optimal détient un élément de prévention, qui en soi est aussi de la performance.

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LA ROTATION EST PARTOUT

Si tu ne travailles pas avec des athlètes en rotation et que tu penses que ce n’est pas pour toi, détrompe-toi. La rotation est omniprésente dans nos activités de vie quotidienne et est une composante de la MARCHE.  Nous considérons la course comme linéaire, mais elle n’est linéaire que vue de l’extérieur. À l’interne, elle est très rotationnelle. Les obliques sont positionnées de manière à nous propulser vers l’avant et permettent un mouvement très efficace. C’est économique et optimal. Donc, bien qu’avoir un six-pack soit beau et bien, on ne peut ni nier ni négliger l’importance des obliques.

Dans de nombreux sports de rotation, la capacité de faire pivoter le bassin indépendamment du tronc sera très importante pour l’efficacité du mouvement. La séparation des hanches et des épaules ne consiste pas seulement à faire tourner les épaules autour du bassin, mais fait principalement référence à la rotation relative entre les hanches et les épaules.

On peut créer un étirement au niveau des obliques en faisant pivoter l’épaule (X-factor) ou on peut garder nos épaules plutôt fixes et utiliser un recul relatif des hanches pour augmenter l’étirement et stocker l’énergie potentielle (X-factor stretch).

Nous pouvons clairement le voir avec l’incroyable contrôle du bassin et la puissance du champion du long coup de départ Jason Zubak! Le même principe s’applique à Roger Federer au tennis, où l’on peut voir le mouvement de ciseaux des hanches, illustrant la contraction des obliques.

L’ÉLASTIQUE

Alors, comment fait-on pour étirer et relâcher l’élastique?  C’est multifactoriel, car de nombreuses parties sont impliquées dans la création d’un mouvement de rotation. Mais tout se résume essentiellement aux obliques internes et externes, que nous appellerons simplement les obliques puisqu’ils fonctionnent ensemble!

Les fibres de l’oblique externe s’étendent en diagonale vers le bas depuis les 5e à 12e côtes pour se fixer sur la crête iliaque, la ligne inguinale et la linea alba. Les fibres de l’oblique interne plus profondes partent de la crête iliaque et de la ligne inguinale pour s’insérer au niveau des 8e à 10e côtes et de la linea alba dans une direction diagonale vers le haut.

Comme tu peux le voir, leurs lignes de traction opposées les font travailler en équipe: l’oblique externe ainsi que l’oblique interne controlatéral contractent pour créer un mouvement dans un motif de X, expliquant l’origine du terme X-factor dans le golf.

Maintenant, si l’objectif est de mieux tourner pour lancer plus fort ou frapper la balle plus loin, ce dont on a besoin au niveau des obliques, c’est la capacité de se détendre d’un côté et de contracter de l’autre; un côté crée une distance entre la hanche et son épaule controlatérale, tandis que l’autre côté les rapproche l’un de l’autre.

Tu peux voir que les obliques ont un grand moment pour affecter non seulement les épaules via la cage thoracique, mais aussi le bassin. Au fur et à mesure qu’une hanche s’éloigne de l’épaule opposée, l’étirement devient plus important et il faudra maintenant une grande force et un contrôle neuromusculaire pour tirer la cage thoracique vers cette hanche stabilisée.

DÉPISTAGE DE LA CAPACITÉ

Bien sûr, accomplir cela n’est pas une mince affaire.

Il y a toujours des capacités préalables fondamentales au mouvement, et le fait de ne pas les posséder affecte les patrons de mouvement préférentiels et change le comportement. Ce comportement devient issu de compensations qui déclenchent un effet boule de neige pour la santé et la performance.

La mauvaise performance d’un mouvement ne provient pas seulement des limitations de l’extensibilité des tissus ou de la capacité à s’étirer. Le fait de ne pas pouvoir assumer une position (et d’en sortir) peut être lié à un mauvais contrôle neuromusculaire ou une mauvaise coordination. Comme nous le savons, la mobilité est une combinaison d’amplitude de mouvement, de contrôle moteur et de force.

Le PELVIC TWIST et le UPPERCUT TEST sont deux tests de dépistage qui permettent de voir si un athlète possède les exigences fondamentales.  Ils donnent des informations sur la capacité d’un individu à effectuer une rotation contrôlée.

Le PELVIC TWIST permet d’observer si un individu peut dissocier le bassin du tronc, un peu comme ce qui est discuté dans un article de blog précédent, mais spécifique à la rotation. C’est un test assez simple. L’individu fléchit le torse à 45° vers l’avant et est invité à faire pivoter ses hanches autour de la colonne vertébrale sans bouger le tronc.

Un athlète est soit capable de dissociation, ou non. C’est une réussite ou un échec, il n’y a pas d’intermédiaire. Les erreurs habituelles sont les hanches qui basculent de haut en bas ou le tronc et les hanches qui bougent ensemble. 

Parfois, on peut facilement observer une incapacité à dissocier les deux. L’échec de cet écran sera un problème majeur. Si un athlète ne parvient pas à contrôler son bassin dans un environnement contrôlé, comment peut-il espérer le contrôler dans un environnement chaotique comme le sport?

Le UPPERCUT TEST permet de voir si l’individu a premièrement la capacité de faire pivoter le tronc sur un bassin stable et, deuxièmement, la capacité de le faire en contractant les obliques externes. Bien que cela semble assez simple, de nombreux athlètes font de la rotation tous les jours sans la capacité de réellement engager ces muscles puissants. Lorsque nous bougeons, nous n’avons pas tendance à faire ce qui est bien, nous avons tendance à faire ce qui est familier. Si les athlètes ne sont pas familiers avec leurs obliques, cela va être un problème majeur.

REGARDE LA VIDÉO PRINCIPALE DE CET ARTICLE POUR VOIR COMMENT CE TEST EST EFFECTUÉ

PERFORMANCE ET PRÉVENTION

Revenons à la composante oubliée dont nous avons parlé plus tôt: relâcher l’élastique.

Il existe une relation longueur-tension optimale pour optimiser la puissance et, du coup, la performance. Tel que mentionné précédemment, essayer d’étirer de plus en plus les obliques en faisant pivoter le tronc vers l’arrière n’est peut-être pas la meilleure solution . Cela ne signifie pas que les athlètes n’ont pas besoin d’une grande mobilité, mais ils doivent également avoir une force et un contrôle considérables dans leur amplitude de mouvement.

La meilleure façon d’éviter de travailler au-delà des fins d’amplitude de mouvement accessibles, en plus d’avoir une mobilité suffisante, est d’avoir une énorme quantité de force et de contrôle pour empêcher le momentum de conduire un individu au-delà de son amplitude finale.

Si un athlète ne peut pas contracter volontairement ses obliques, il est peu probable qu’il les contracte correctement pendant son sport. Bien que les mouvements sportifs de haut niveau se déroulent en automaticité (compétence inconsciente),

la maîtrise vient de la capacité de faire les choses lentement et sous contrôle

Contrôler le mouvement, ne pas le laisser vous contrôler.

Un autre problème lié à l’incapacité de contracter les obliques est qu’il résulte en une rotation sous-optimale. Dans ce cas, le corps trouvera les moyens de faire le travail, en particulier chez les athlètes qui sont les stars de la compensation pour résoudre les problèmes moteurs. Par exemple, de nombreuses personnes feront la rotation principalement avec leur grand dorsal controlatéral ou feront une flexion latérale au lieu d’une rotation. Dans les deux cas, c’est no bueno. 

L’échec à la fois du PELVIC TWIST et du UPPERCUT TEST est un bon indicateur que les athlètes viendront vers nous avec des problèmes de douleur lombaire. La lombalgie est multifactorielle (manque de mobilité de la hanche ou de la colonne thoracique, technique inadéquate, etc.) mais on ne peut pas nier l’importance du contrôle du tronc et de la force / endurance du tronc pour prévenir de tels problèmes, car c’est ce qui empêche le momentum de nous emmener au-delà de notre fin d’amplitude de mouvement.

PLUS QU’UN SIX-PACK

Les sports sont une question de puissance. Soit on veut générer plus de puissance maximale, soit on veut générer le plus de puissance avec la plus petite quantité de force nécessaire, ce qui vous permettra d’économiser de l’énergie à long terme et un partage optimal des forces entre plusieurs articulations.

Quand on parle de la force du tronc et de la puissance de rotation, le héros n’est pas le six-pack tant recherché. Des obliques forts et puissants sont essentiels, tout comme le contrôle neuromusculaire pour les activer au bon moment. Sans cela, les athlètes n’exploitent certainement pas leur plein potentiel.

RÉFÉENCES

1. Lindsay DM, Vandervoort AA. Golf-Related Low Back Pain: A Review of Causative Factors and Prevention Strategies. Asian J Sports Med. 2014;5(4). doi:10.5812/asjsm.24289
2. Abdominal muscle activation of elite male golfers with chron… : Medicine & Science in Sports & Exercise. Accessed April 3, 2021. https://journals.lww.com/acsm-msse/Fulltext/2001/10000/Abdominal_muscle_activation_of_elite_male_golfers.6.aspx

Marc-Antoine Bérubé

en collaboration avec Mai-Linh Dovan M.SC., CAT(C)

Marc-Antoine est impliqué dans le baseball depuis de nombreuses années. Il a joué au sein de la structure de Baseball Québec, au Northeastern Oklahoma A&M College et à l’Université de Pittsburgh. En 2015, il a été sélectionné dans le repêchage de la MLB par les Oakland Athletics. Depuis sa retraite, Marc-Antoine transmet sa passion aux jeunes espoirs en tant qu’entraîneur des lanceurs de l’Académie Baseball Canada.